Les vipères de France métropolitaine.
L'animal
n’a pas bonne réputation, pourtant la dangerosité des vipères
françaises est aussi relative que celle d’un frelon, d’une guêpe
ou d’un automobiliste, tous, moyennant de fâcheux concours de
circonstances sont potentiellement mortels.
Un lourd passé de préjugés:
Le serpent est l’origine du mal. Le serpent de la Genèse. Eve et l’église catholique n’ont visiblement pas œuvré en leur faveur.
Pourtant, il n’en fut pas toujours ainsi et de nombreux peuples vénéraient les serpents pour obtenir fertilité et fécondité. Le serpent d’Asklepios (dieu de la médecine chez les grecs) ou d’Esculape (chez les romains) est devenu l’emblème universel des professions médicales. Mais, me direz vous, il s’agit d’une couleuvre...
Il semblerait malheureusement que le lourd passé de stigmatisation du serpent rendu démoniaque par quelques soutanes l’ait emporté et qu’aujourd’hui un long travail de réhabilitation s’impose.
Je ne rentrerai pas dans le détail d’affirmations toutes plus irrationnelles les unes que les autres : les serpents tètent les vaches, ils hypnotisent leurs proies, ils peuvent aussi se mordre la queue réalisant ainsi un cerceau pour dévaler les pentes à votre poursuite, « on » lâche des vipères par hélicoptère etc. Tout ceci relève de l’imagination fertile de certains esprits peu cartésiens.
Faisons connaissance avec les quatre espèces de vipères vivant en France.
Avant tout il peut être utile de savoir reconnaître une vipère.La Vipère aspic (Vipera aspis).
C'est la
plus répandue, elle est présente au sud d’une ligne joignant le
sud est de la Bretagne au massif du Jura, quelques localités sont
cependant connues plus au nord. Elle se raréfie parfois en plaine,
est commune dans les Pyrénées, plus rare sur le pourtour
méditerranéen.
La Vipère péliade (Vipera berus).
Elle vit en
France principalement dans le nord ouest
de la
Bretagne au Pas de Calais et aux Ardennes, au dessus de 900m
généralement dans le massif central, dans les massifs du Jura, elle
est assez localisée en Lorraine et en déclin dans de nombreuses
régions notamment dans les Vosges.
La Vipère de Seoane (Vipera seoanei).
Espèce
endémique nord ibérique ne pénètre en France que dans une toute
petite région du Pays Basque au sud d’une ligne Bayonne-Cambo.
La Vipère d’Orsini (Vipera ursinii).
Elle ne
subsiste en France que dans quelques stations isolées des
Alpes-Maritimes, des Alpes-de-Haute-Provence, du Var et du Vaucluse
entre 900 et 2100 mètres d’altitude, également en déclin dans
toute son aire de répartition un programme LIFE
favorisant entre autre la conservation et la restauration de son
habitat est en cours pour les populations françaises. A noter que
les morsures constatées à ce jour par cette vipère n’ont
nécessité aucune hospitalisation, son venin est peu toxique pour
l'homme.
Biologie
Les vipères
comme les autres serpents, les lézards et les amphibiens sont des
animaux qui ne peuvent réguler leur température corporelle de façon
autonome comme les mammifères ou les oiseaux. Ils doivent donc
s’exposer à la chaleur pour atteindre une température optimum
leur permettant de «fonctionner». Pour ces espèces, cela induit
une activité saisonnière au printemps, en été et en automne sous
nos latitudes avec une période d’hibernation en hiver dont la
durée dépend des températures extérieures.
La taille
adulte n’excède pas 90cm pour les plus grands spécimens de
Vipères aspic mais la Vipère d’Orsini n’atteint pas cette
taille, c’est la plus petite de nos vipères, environ 40 cm en
moyenne à l’age adulte.
La durée
de vie maximum en milieu naturel semble difficile à affirmer, elle
serait d’environ 18 ans pour la Vipère aspic, 12 ans pour la
Vipère péliade, 13 ans pour la Vipère de Seoane et de 7 à 10 ans
pour la Vipère d’Orsini.
La Vipère
aspic se nourrit principalement de micro-mammifères à l’age
adulte ainsi que de temps à autre de quelques lézards et oisillons,
la Vipère péliade et la Vipère de Seoane rajoutent à ce régime
de nombreuses grenouilles, quant à la Vipère d’Orsini qui est
plutôt spécialisée, son régime alimentaire est composé en grande
majorité d’orthoptères, principalement de criquets et sauterelles
ce qui est une exception chez les vipères.
Comme chez
les lézards l’organe reproducteur des mâles est pourvu de deux
hémipénis utilisés alternativement. Les accouplements ont lieu au
printemps et les naissances en fin d’été ou en septembre. Les
vipères sont ovovivipares, les œufs éclosent dans le ventre de la
mère et elle donne naissance à des vipéreaux parfaitement formés
et autonomes. 4 à 6 jeunes pour la Vipère d’Orsini mesurant de 12
à 14 cm, 3 à 8 petits d’environ 19 cm pour la Vipère de Seoane,
2 à 20 allant de 15 à 22 cm pour la Vipère péliade et la Vipère
aspic. Les jeunes possèdent déjà le précieux venin qui va leur
permettre de s’alimenter, il n’est donc pas judicieux de vouloir
les manipuler.
Prédation
Les
principaux prédateurs des vipères sont certains mammifères:
renards, blaireaux, des oiseaux: aigle royal, grands corbeaux, le
Circaète Jean le blanc qui se nourrit pratiquement exclusivement de
serpents et bien sur l’homme: destruction directes des animaux et
de leurs habitats.
Protection
Les vipères
comme tous les serpents de France sont protégés par la loi, la
Vipère aspic et la Vipère péliade bénéficient d'une protection
partielle et la Vipère de Séoane et la Vipère d'Orsini d'une
protection intégrale: Légifrance
Les vipères « attaquent »-elles selon ce terme couramment employé?
On imagine
déjà l’animal embusqué nous sauter à la gorge au détour d’un
chemin. Désolée de casser le mythe mais il n’en est rien, la
vipère, morphologiquement ne peut pas sauter, de plus comment ferait
elle ensuite pour nous consommer ? Et oui, les serpents ne sont
pas comme nous, l’agression gratuite ne fait pas partie de leur
mode de vie. Reste donc la rencontre inopinée. Dans ce cas la
surprise et la peur sont largement réciproques, généralement la
vipère prendra la fuite. Assez rarement, dans certaines situations
(pas de repli possible, maladie, gestation, digestion, température
trop fraîche, etc.) l’animal peut faire face au danger et prendre
alors une posture d’intimidation pour dissuader un éventuel
prédateur. Si vous n’essayez pas de la manipuler et que vous la
contournez en gardant une distance de sécurité d’environ un mètre
l’histoire s’arrêtera là. Si vous devez impérativement écarter
ou repousser un individu, (dans votre jardin par exemple) ne jamais
le toucher à mains nues ou avec le pied, aidez vous d’une branche
ou d’un bâton d’au moins un mètre et contentez vous de le
pousser légèrement, ce contact devrait suffire à l’inciter à
partir.
Les morsures de vipères sont-elles mortelles ?
Encore une
fois on s’imagine que l’on est voué à une mort certaine
foudroyé en quelques minutes alors que la réalité est tout autre.
Sans écarter
les risques réels liés à une envenimation, il est important d’être
informé pour agir dans le calme et en connaissance de cause. Voici un lien traitant
du sujet :
Quelques précautions assez simples peuvent éviter les accidents :
Porter des
bottes dans les hautes herbes lorsque cela est possible. Regarder où
l’on met les pieds, les mains et l’endroit où l’on va
s’asseoir dans les milieux favorables aux rencontres avec les
vipères, montagne, bordures enherbées de chemins et de prairies ou
autres cultures, lisières de bois, jardins, murets et tas de
pierres, falaises d’escalade...
Particulièrement
en camping (surtout en montagne), vérifier l’intérieur du sac de
couchage et les vêtements restés dans la tente, l’idéal étant
de fermer la tente durant son absence. Vérifier sous le sac à dos
mais aussi à l’intérieur si vous l’avez posé longtemps ouvert
dans la végétation....
Certaines
morsures ont lieu lors du ramassage de petits fruits genre
myrtilles, en présence d’une végétation abondante dans un lieu
ensoleillé les vipères peuvent profiter de la chaleur sous le
couvert végétal et sont alors peu visibles. Il suffit alors d’être prudent et
de ne pas y mettre les mains et les pieds avant de s’être assuré
de le faire en toute sécurité. Inutile de crier, les serpents sont
pratiquement sourds mais sont sensibles aux vibrations, un peu de
remue ménage sur le sol et dans les arbustes environnants à l’aide
d’un bâton les fera normalement fuir. Mais dans tous les cas
l’essentiel est de bien regarder où l’on met les mains.
Lors de
travaux agricoles, maraîchage par exemple, ou simplement dans son
jardin il convient de respecter les mêmes règles de prudences. Les
vipères ne sont pas agressives, elles peuvent mordre mais seulement
si elles y sont contraintes, c’est à dire uniquement si vous les
touchez, si vous marchez dessus ou si vous vous asseyez dessus, il
est donc important d’avoir conscience des risques pour éviter tout
accident, tout comme nous devons faire attention de ne pas avaler une
guêpe, de ne pas traverser la route sans regarder, etc.
Un accident
reste néanmoins possible, et, malgré toutes nos précautions il
arrive parfois que l’on ne puisse l’éviter.
Mais vous
semblerait-t-il cohérent de demander l’extermination de toutes les
guêpes, abeilles, frelons car nous courons le risque d’en avaler
un ou bien d’être allergique à leur venin? Une quinzaine de morts
tout de même chaque année en France...Les vipères sont loin
derrière... Ne parlons pas des accidents de la route, chacun à bien
conscience qu’à chaque fois qu’il monte dans sa voiture ou qu’il
traverse une route il prend des risques, il ne nous vient pas à
l’idée pour autant de détruire toutes les voitures...Il
semblerait malheureusement que les vipères ne bénéficient pas de
cette sorte «d’acceptation culturelle du risque » qui fait
que l’on a conscience du danger, que l’on fait tout pour
l’éviter, mais que l’on vit avec...Pourquoi les vipères
devraient elles être exclues de ce fonctionnement ? Il
appartient à chacun d’entre nous d’apprendre à connaître ce
qu’il redoute pour mieux s’en protéger me semble-t-il, il est
évident que ce n’est pas en écrasant primitivement un serpent
dont on ne sait rien que l’on réduira le risque de se faire mordre
par une vipère un jour ou l’autre. Ceci démontre juste
l’irrationalité des réactions liées aux serpents, il ne faut pas
oublier qu’en France les cas mortels résultants d’une
envenimation suite à une morsure de vipère sont extrêmement rares
et ne justifient pas une telle psychose à l’égard des serpents.
J'ai rencontré une vipère cet après midi dans ma cour ! et je ne faisais pas la fière mais je ne suis pas sure qu'il s'agissait d'une vipère comment savoir ???? il y a 15 jours ou 3 semaines c'était une coronelle lisse et aujourdh'ui une vipère. il faut dire que notre maison est située non loin d'une voie ferrée.
RépondreSupprimerCe blog est très beau !
RépondreSupprimerJ'habite dans le Pas de Calais, entre Douai et Cambrai. J'ai le plaisir de cotoyer quelques animeaux sympathiques dans mon jardin : chauve-souris, chouettes (ou hiboux ?), grenouilles (j'ai une petite mare), hérissons, libellules...et quelques spécimens allongés et rampants que j'appelle serpents par incapacité à distinguer l'une ou l'autre éspèce. Hier, je me disais que je n'en avais pas croisé depuis longtemps et j'ai eu la surprise d'entendre souffler une petite bête verte (ou jaune ?) qui s'est vite sauvée. Si j'en ai l'occasion, je prendrai des photos et je vous les enverrai car vous me semblez bien connaître tout ce qui ressemble à un serpent. J'aime passionnément observer les animaux en liberté. Partager le jardin avec eux est un privilège pour moi, mais aussi pour mes enfants...Il me reste à apprendre à les connaître, au moins pour être capable de les nommer correctement !
Bravo encore pour ce blog.
Amicalement.
Elisa R.
Merci pour ce blog très instructif !
RépondreSupprimerAppreciate this blogg post
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